La Terre et les hommes
| Le Cadre communautaire| Introduction
Il est généralement
admis que la «pieve» est une
circonscription religieuse étable dès le premier siècle du christianisme en
CORSE, correspondant à des régions naturelles ou géographiques. La racine est
latine : Plebs
= le peuple. Ce terme désigne à l’origine une tribu ou peuplade et plus tard il
devient synonyme de canton.
La «pieve» se forme d’abord qu’une seule paroisse, puis elle se
subdivise et comprend alors un certain nombre de paroisses soumises à la
juridiction spirituelle d’un seul curé appelé « pievan ».
Le mot «pieve» désigne donc à la fois le
territoire, le canton, les paroisses soumises à la juridiction du pievan, l’église
principale du canton et les biens qui forment le patrimoine de cette église.
Les Pisans puis les
Génois, adoptèrent les paroisses et les «pieve»
comme base de leurs circonscriptions administratives. Cette répartition
sera consommée par le Gouvernement National de Pascal PAOLI,
ainsi que par l’administration Française.
En fait, l’origine des «pieve» est assez mal connue, et si
l’hypothèse religieuse est difficilement réfutable, rien ne nous permet
d’affirmer que cette création est réellement due à l’église. En tous cas il est
certain qu’elle l’a largement utilisée.
Il en est de même pour
l’hypothèse géographique. Le territoire d’une «pieve» correspond généralement à une vallée, mais cette
affirmation ne parait pas être une vérité absolue puisque les limites d’une «pieve» ne correspondent pas toujours
aux limites naturelles (montagnes, rivières, et sont souvent en contradiction.
C’est pourquoi, on peut
définir plus simplement, comme le fait Ange ROVERE[1],
la «pieve» comme le territoire dont
les hommes ont besoin pour faire face à la diversité des besoins économiques.
On peut alors parler de cellules sociales, la «pieve» étant la première forme d’organisation de la société
insulaire, celle qui groupe les bergers dès l’origine de l’histoire Corse. Le
terme exprime l’ensemble des familles dans une même collectivité qui finit par
se confondre avec le territoire du
domaine déterminé qu’elle occupe.
Certaines
disparaissent, d’autres évoluent, et au 18ème siècle on en compte 66
pour l’ensemble de la CORSE. (Voir Carte [2]).
Chaque «pieve» est constituée de communautés
villageoises, et BASTELICA fait partie de le «pieve» de CAURO avec ECCICA-SUARELLA, OCCANA, TOLLA et CAURO.
Au milieu du 18ème
siècle, le nom de la «pieve» change,
mais elle garde absolument le même visage.
Voici le récit que fait
FUMAROLI[3] de
ce changement :
« A l’époque de
la nomination des «pieve», les délégués de
BASTELICA ne voulaient plus de l’ancienne appellation…..Le général PAOLI
intervint et dit : « SAMPIERO est né et
est mort dans votre canton, et illumine la CORSE de sa vertu… ». C’est
donc le Général PAOLI qui a proposé de changer le nom de «pieve» de CAURO
contre celui de SAMPIERO. »
Au-delà du cadre
mouvant, plus ou moins large de la «pieve»,
il y a la Communauté qui est la cellule sociale fondamentale.
La définition la plus
satisfaisante est celle donnée par CHIVA[4] :
« Une totalité
de foyers détenant un territoire et liés entre eux de telle sorte que la
totalité est compétente pour s’immiscer selon des normes précises dans l’activité
économique et les droits juridiques de chacun des foyers . »
Ainsi, la totalité a la
compétence de régler l’ensemble de la vie sociale, et le village est considéré
comme une unité sociale spécifique.
Le fonctionnement de la
communauté villageoise Corse est fondé sur la démocratie totale. Cette capacité
de la « totalité » se traduira sur le plan institutionnel par
l’existence d’une Assemblée Générale des habitants, véritable émanation du peuple.Une telle institution que l’on peut ajouter à
l’apparente complication des attributions juridiques et administratives dans un
seul village frappe les esprits.
En fait, il faut partir
de cette idée : avec le contexte géographique (montagnes avec côtes
malsaines), et historique (absence d’une autorité centrale vraiment acceptée et
effective) le village remplit de très nombreuses fonctions sociales. Toutes
celles qui sont propres à l’existence du groupe, depuis l’organisation de la
subsistance jusqu’à celle de la Justice.
[1] Ange ROVERE : « 1729-1769 : La CORSE pouvait-elle devenir une nation ? » D.E.S. NICE 1969
[2] Carte parue dans l’ouvrage de Roger CARATINI « Histoire du Peuple Corse » mai 1998
[3] Dominique FUMAROLI : « La pieve de BASTELICA, esquisse historico géographique ».
BASTIA BSSHNC n° 425/428 2ème trimestre 1921.
[4] J. CHIVA : « Enquête sur la structure sociales des villages corses. » Laboratoire d’ethnologie française. CNRS PARIS Février 1956