Aspects
de la vie sociale…|Les groupes sociaux | (Suite)
Ce système de prêts à
intérêts n’est pas propre à la Corse et existait déjà au Moyen Age sur le
continent.
Il va connaître un
développement particulièrement important en Corse à partir de 17ème
siècle.
Principe
général :
Une personne qui a
besoin d’argent s’adresse à un bailleur de fonds et concède à celui-ci un droit
de rente sur un bien immobilier.
La somme perçue par
le propriétaire n’est pas remboursée, mais chaque année le bailleur de fonds
reçois un censo
qui est en somme l’intérêt de son argent.
Capital de Censo à
BASTELICA d’après le Registre de Notaires (1641-1646)
Date |
Prêteur |
Emprunteur |
Somme (lires) |
Biens en gage |
02/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Agostino de
Domenico |
8 |
Terre à la plage |
02/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Caporal
Paolo |
4 |
1
chioso |
12/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Andrea Vincenti |
12 |
2
chiosi |
12/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Valerio
de Gio Andrea de ECCICA |
16 |
2
chiosi |
15/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Signor Dottor Gio
Batista de Gironimo Valle |
8 |
2
terres à la plage |
15/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Gio
Francesco de Domenico |
8 |
1
chioso |
15/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Silvestro
de Natale |
4 |
Terre à la plage |
15/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
GionAnello
d’Anton Paolo |
4 |
1
chioso |
15/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Ambroso
de Micheli |
8 |
Terre à la plage |
15/05/1642 |
Capitaine
Andrea Costa d’Alfero Geronimo |
Domenico de Felippo |
12 |
Terre à la plage |
Le contrat se
présente toujours ainsi :
« Agostino de Domenico ha imposto constitute impose un annue e perpetue censo di lire 8 sopra
la sua terra : il quale censo a vendute lire 80 al Capitano Andrea Costa
d’Alfero Geronimo”
Le censo désigne le
montant annuel de la rente (On l’appelle aussi reddite ou frutte).
Le prix de cette
rente (ici 80 lires) est le capital du censo. Le montant du censo s’élève à un dixième du capital/
Au bout de 10 ans, la
somme est entièrement remboursée, et dès lors tout est bénéfice pour le prêteur
qui continue de recevoir annuellement et perpétuellement cette rente.
Le plus sou vent les « capitali di censo » sont de modestes sommes.
Mais la même personne
peut les cumuler, et l’ensemble constitue une appréciable source de revenus.
C’est le cas du
Capitaine COSTA qui faisait grand commerce de son argent placé dans des
affaires à AJACCIO, BASTIA et même GENES.
En ne retenant que le
seul mois de MAI 1642, il a signé une trentaine de contrats avec les petits
propriétaires de la région, pour un montant total de « capitali di censo » de plus de 3000 lires,
ce qui lui assure une rente perpétuelle de 300 lires.
Le Capitaine ne s’en tient pas là et dans les années
suivantes, à la faveur peut-être de difficultés économiques qui mirent dans
l’embarras les habitants de BASTELICA et des villages environnants, il achète
encore de nombreuses rentes.
Grâce à ce système le
Capitaine COSTA détient une emprise économique importante sur les gens de
condition inférieure.
Ces rentes de 10% des« capitali di censo » n’épuise pas les revenus
des terres hypothéquées. Ceux qui les ont créées peuvent se libérer de cette
charge en rachetant les rentes. Le prix
de rachat de la rente est le même que celui de sa vente. Cela compense
partiellement le caractère usuraire de cette rente constituée.
Ce système s’est
imposé grâce à la faveur des autorités ecclésiastiques. Il est précisé dans le
contrat que le rachat de la rente sera toujours possible conformément à la
bulle du Pape Pie V.
Le capital de censo peut être
également revendu avec bénéfice par celui qui en perçoit les revenus. Il change
souvent de mains avant d’être racheté.
Il peut être transmis
par testament, et en cas de non paiement, le bailleur
de fonds peut louer à son profit les terres sur lesquelles repose la rente.
Contrairement aux
prêts ordinaires, qui, comme on l’a vu, intéresse autant les gios que les non gios, le« capitali di censo »
est réservé au notable du village, et au plus riche de tous.